Le cinéma paysan se porte plutôt bien avec récemment la sortie du film d’Hubert Charuel, Petit Paysan, qui a connu un certain succès en salles, et, la semaine passée, celle du documentaire de Christophe Agou, Sans Adieu, sur les derniers paysans du Forez, lui aussi bien accueilli par la critique.
Certes le cinéma rural n’a pas eu le même lustre en France qu’outre-Atlantique. John Ford, le réalisateur des Raisins de la Colère et de nombreux westerns, aimait à dire : « Je suis paysan et je fais des films de paysans ». Mais dans les décennies passées, certains films comme La Horse avec Jean Gabin ou Les Granges brûlées avec Simone Signoret, et des adaptations comme Regain par Marcel Pagnol, Le Cheval d’orgueil par Claude Chabrol ou Jean de Florette par Claude Berri, ont connu un grand succès en salles. Mais ce sont les exceptions qui confirment la règle, car beaucoup d’autres films donnaient une image caricaturale jusqu’à la niaiserie du monde paysan.
Par contre la France cultive un réel savoir-faire dans le documentaire sociologique, en grande partie grâce au Service Cinéma du ministère de l’Agriculture. Créé en 1947 par Armand Chartier, un passionné d’éducation populaire et de cinéma, – pour réaliser des films techniques qui progressivement vont s’orienter vers une approche plus sociologique -, il produira plus de 500 films et fera travailler de grands réalisateurs comme Robert Enrico, Jacques Demy, Jacques Doillon, Marcel Bluwal, René Clément, Denys de la Patellière et bien sûr Georges Rouquier, le réalisateur de Farrebique et de Biquefarre, considérés comme des films cultes aux Etats-Unis. Dans leur sillage, on retrouve Bernard Dartigues avec La Part des choses, Raymond Depardon avec Profils paysans et, aujourd’hui, le photographe Christophe Agou, le réalisateur de Sans Adieu, (décédé après le montage de ce film), qui propose un regard tendre et âpre sur ces derniers paysans du Forez confrontés à la solitude et à la vieillesse et représentants d’un monde qui disparaît dans l’indifférence générale.