En décembre 2017, l’assemblée générale de l’ONU adoptait, malgré l’opposition des Etats-Unis et d’Israël, une résolution déclarant 2019 année internationale de la modération. L’objectif des initiateurs étant de faire mieux entendre les voix des modérés par la promotion du dialogue, de la tolérance, de la compréhension et de la coopération plutôt que celles des extrémistes violents. En ces temps, où semblent prévaloir un peu partout sur la planète des positions qui ne font guère dans la nuance, cette résolution apparaît presque comme une provocation. Pour autant, l’année 2019 sera-t-elle plus modérée que 2018 ? Nul ne le sait, même si l’on peut penser qu’au niveau climatique, les bouleversements entamés depuis quelques décennies ne vont pas cesser d’un coup de baguette magique ou qu’en matière de géopolitique le ciel diplomatique n’a guère de chance de se montrer plus clément. Dans son homélie de Noël, le pape François prônait lui aussi une forme de retenue devant cette « insatiable voracité des hommes », qui fait que « quelques-uns se livrent à des banquets tandis que beaucoup d’autres n’ont pas de pain pour vivre ».
Car cette résolution onusienne s’adresse aussi à chacun d’entre nous. Sur les réseaux sociaux, des milliers de modérateurs passent leur temps à nettoyer le web des textos les plus outranciers et haineux écrits par nos contemporains. Et lorsque les autorités décident d’une baisse de la vitesse automobile sur les routes secondaires, cela suscite une levée de boucliers. Plus que jamais, nous avons besoin de circonspection, de sagesse et de pondération, dans ce monde plein d’incertitudes. En cette année 2019 qui commémorera la mort, il y a 400 ans, de l’agronome Olivier de Serres, prenons exemple sur cet honnête homme de la Renaissance, protestant en ces temps de guerres de religion, érudit modernisateur de l’agriculture et homme de tempérance. « La modération est la santé de l’âme », écrivait La Rochefoucauld dans ses Maximes.