C’est une première : une semaine de l’agriculture sans salon ! Au moins échappe-t-on aux défilés ennuyeux des politiques dans les allées surpeuplées du Parc des Expositions, retransmis presque en continu par les chaines d’information. A défaut de salon, le rendez-vous médiatique avec les campagnes est bien présent et plutôt de qualité, à l’image de ce documentaire d’Agnès Poirier et de Fabien Béziat, Nous Paysans, à l’écriture si peaufinée, qui, la semaine dernière, a attiré plus de 5 millions de téléspectateurs sur France 2. Ce qui tend à prouver un réel intérêt de la part de la société pour les choses de la terre, dans le sillage des succès au box-office de Petit Paysan et d’Au nom de la terre, et de la reconnaissance de romans comme Nature Humaine de Serge Joncour et Histoire du fils de Marie-Hélène Lafon, respectivement Prix Médicis et Prix Renaudot en 2020.
Il fut un temps, pas si lointain, où proposer un manuscrit traitant des questions agricoles à des éditeurs grand public était rejeté au prétexte qu’il ne trouverait pas son public. Même attitude dans l’audiovisuel ou la presse grand public ! Pendant des années, certains milieux intellectuels ont méprisé tout ce qui touchait à la vie des hommes et femmes de la terre, considérant ces thèmes comme passéistes, voire ringards.
Les temps semblent changer. Les crises environnementales, confirmées par la pandémie, ont bouleversé nos repères, montré la fragilité de nos sociétés et de leur approvisionnement, changé notre rapport à la nature, au vivant, aux territoires. L’opinion découvre ainsi que l’agriculture est plus que l’agriculture, comme en témoignait Edgard Pisani dans Le vieil homme et la terre, et qu’elle se situe au cœur des grandes fractures sociétales : enjeux géopolitiques (un art du local dans un monde globalisé), économiques (mondialisation), territoriaux (métropoles et campagnes), culturels (paysages, gastronomie, sécurité alimentaire) … Plus que jamais, l’agriculture s’impose comme un enjeu de société.