Lance Amstrong, Jérôme Kerviel : tous deux se sont imposés bien malgré eux dans l’actualité de la semaine passée. Deux destins brisés dans une orgueilleuse course à l’argent fou et à la gloire ! L’ex-champion cycliste s’est vu retirer ses sept titres de vainqueur du Tour de France et doit rembourser toutes ses primes. L’ex-trader a écopé de trois ans de prison ferme et doit rendre la somme ubuesque de 4,9 milliards d’euros de dommages et intérêts à la Société générale. Soit 370 000 ans de Smic ! Dans les deux cas, les instances de contrôle n’ont pas vraiment fonctionné. Dans les deux cas, les systèmes mis en place se veulent particulièrement complexes. Côté caravane du Tour, avec des molécules toujours plus sophistiquées pour masquer EPO et autres corticoïdes. Côté salle des marchés, avec des modèles mathématiques dont la complexité défie l’entendement des patrons des banques.
Alors coupables Amstrong et Kerviel ?, certainement. Boucs-émissaires ?, sans doute. Victimes ?, peut-être. Amstrong, victime de sponsors et d’un public qui demandent toujours plus d’exploits. Kerviel, victime de cette addiction aux galipettes électroniques à risque encouragée par un système financier tout aussi cupide qu’irresponsable, et qui, paradoxalement, refuse de partager les profits mais appelle l’aide de l’État dès que s’annoncent les pertes.
Tout cela n’est-il pas avant tout le reflet d’une époque où tous les moyens sont bons pour faire fortune et accéder à la gloire ? Pourtant Émile Zola, – cité par Régis Debray dans son excellente revue Medium, consacré à l’argent -, s’inquiétait déjà dans Le Gaulois du 14 février 1882 que la probité était en train de disparaître : « C’est à peine si on se cache aujourd’hui de n’être point un honnête homme… Voler dix sous est toujours volé mais faire disparaître cent millions n’est point volé ». A en croire Zola, en un peu plus d’un siècle, seul le montant des sommes semble avoir changé !