Un an à peine après avoir interpellé le Premier ministre, les industriels de l’agro-alimentaire viennent de publier une tribune à charge contre la guerre des prix au niveau de la grande distribution, risquant d’entraîner des difficultés voire la fermeture de bon nombre de petites et moyennes entreprises. Ce n’est pas nouveau. Depuis les années 1970 de forte inflation, les pouvoirs publics, les yeux rivés sur l’indice des prix, ont encouragé la grande distribution dans un pays aux traditions paysannes et latines fortes et qui, dans son échelle des valeurs, plaçait le producteur loin au-dessus du commerçant. Depuis le rapport de forces a nettement tourné à l’avantage de la grande distribution : une poignée de centrales d’achats contre un peu plus de 15 000 entreprises, pour la plupart des PME !
« Savez-vous quelle est la différence entre un terroriste et un patron de supermarché ? » m’avait un jour demandé un industriel ; il ajoutait : « Vous pouvez négocier avec le terroriste. » En l’an 2000, un expert-comptable, Christian Jacquiau, publiait Les coulisses de la grande distribution, dans lequel il dénonçait des méthodes de mafieux, violant le cadre législatif pourtant fait sur mesure pour eux, lorsque leurs intérêts se trouvaient menacés. On se souvient aussi du témoignage de Michel Charasse mettant à la porte le démarcheur d’une grande enseigne qui voulait s’implanter dans sa ville, une valise de billets à la main pour faciliter la négociation ! D’année en année, la marge de la grande distribution n’a pas cessé de progresser au détriment de celles de l’agriculteur ou de l’industriel, mais pas forcément au bénéfice du consommateur. L’actuelle guerre des prix ne rapporterait que quelques centimes d’euros par semaine aux consommateurs ! Faut-il dès lors s’étonner d’un taux de chômage très élevé et d’une désindustrialisation alarmante du pays ?, doit s’interroger le citoyen.