Loin de moi l’idée d’en rajouter en cette rentrée marquée par la morosité. Mais le constat est là. On fait la queue devant les communautés Emmaüs qui vendent à très bas prix des articles scolaires. Et quiconque fréquente les supermarchés voit bien les effets de la crise : augmentation du temps consacré aux courses, comparaison des prix, utilisation des tickets de réduction et beaucoup moins d’achats d’impulsion, pour le plaisir. « La pauvreté revient en Europe », déclarait, la semaine passée, Jean Zijderneld, le Pdg d’Unilever, le géant anglo-néerlandais de l’alimentaire et des cosmétiques, dans une interview à un journal allemand. Les faits sont là, incontournables. Dans la zone euro, 18 millions de personnes sont au chômage. Un record ! En Europe, 80 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté. Dans l’Hexagone, un Français sur sept est considéré comme pauvre.
Mieux que les instituts de sondages, la grande distribution connaît instantanément l’état de l’opinion et l’évolution du pouvoir d’achat des consommateurs. Elle tente de s’adapter à cette nouvelle donne. C’est ainsi qu’Auchan vend des yaourts à l’unité, comme le fait Danone au Bangladesh. Unilever s’inspire des méthodes qu’il utilise dans les pays asiatiques en développement en vendant des produits meilleurs marchés dans de petits conditionnements. « Si un Espagnol ne dépense plus en moyenne que 17 € pour faire ses courses, déclarait Jean Zijderneld, je ne vais pas lui proposer un paquet de lessive qui coûte la moitié de son budget ». D’où la vente dans la péninsule ibérique de petits paquets permettant d’effectuer cinq lessives ! Dans le même temps, le patron de la Banque mondiale s’inquiète de l’augmentation des cours des céréales et craint le retour des émeutes de la faim, comme en 2008. Dans les pays du Sud en voie de développement, comme ceux du Nord (en voie de sous-développement ?), le tragique constat s’impose : la pauvreté prospère.