D’Al Qaida à Daech, en passant par les actes terroristes des dernières semaines dans Paris, l’islamisme radical nous fait oublier que l’Islam a pu être au Moyen-Age (et peut l’être encore) synonyme d’un niveau de civilisation élevé, tandis qu’à la même époque, l’Occident chrétien se lançait dans l’aventure périlleuse et souvent violente des Croisades. Ainsi l’exemple de l’Espagne, en grande partie conquise depuis 711 par les Omeyyades (que Charles Martel stoppera à Poitiers en 732), avec cette civilisation hispano-musulmane plutôt tolérante et brillante, comme en témoigne au XIème siècle la ville de Cordoue, cité du médecin, philosophe et théologien Averroès, avec ses éclairages publics et son tout-à-l’égout, sa première école de médecine où Avicenne mènera ses travaux sur la méningite et la pleurésie, et sa bibliothèque de plus de 400 000 ouvrages (la plus grande à l’époque en Occident). C’est d’ailleurs grâce aux traductions arabes que les universités européennes découvriront la tradition grecque. Dans l’agriculture, la Conquista a apporté l’alambic et la rose de Damas, l’aubergine et la laitue, le melon et l’artichaut, le cheval berbère et le mouton maghrébin, ancêtre du mérinos qui fera au XVIème siècle la richesse du royaume d’Espagne. Aux Xème et XIème siècles, des agronomes musulmans andalous vont développer l’irrigation et l’art des jardins, expérimenter le travail méticuleux du sol et adapter de nouvelles cultures dont le riz, le cotonnier, la canne à sucre et les agrumes. Pionniers de la recherche agronomique, ils seront les promoteurs du développement durable, prônant le respect des équilibres naturels. Parmi ces agronomes, le plus célèbre, Ibn Al-Awwâm, est l’auteur d’un volumineux Livre de l’agriculture qui recense, quatre siècles avant Olivier de Serres, toutes les connaissances agronomiques de l’époque et servira longtemps de référence. Au XIXème siècle, l’administration coloniale française s’inspirera de cet ouvrage pour mettre en valeur l’agriculture algérienne.