Robert Poujade, premier ministre de l’environnement au début des années 1970 avait relaté son expérience dans un livre titré Le ministère de l’impossible. Tout est dit dans ce titre. Depuis plus de 25 ministres et secrétaires d’Etat, des politiques plus ou moins expérimentés, des militants plus ou moins sincères et des techniciens plus ou moins pointus, lui ont succédé avec plus ou moins de bonheur. Plutôt moins, car beaucoup ont témoigné de leurs difficultés. Sous Mitterrand, Huguette Bouchardeau reconnaissait que son avis ne pesait pas lourd, confronté aux discours d’un industriel, d’un agriculteur ou d’un économiste. Sous Chirac, Corinne Lepage avait titré son livre : On ne peut rien faire, Madame la ministre !. Sous Sarkozy, Nathalie Kosciusko-Morizet avait dû gérer les remises en cause de son président après le Grenelle de l’environnement. Sous Hollande, face à un budget en baisse et des arbitrages perdus, Delphine Batho avait jeté l’éponge. Nicolas Hulot, qui avait à différentes reprises refusé le poste, savait toute la difficulté de la tâche. Il écrivait en 2005 dans Graines de possibles : « Tant qu’on ne lui donne pas une lisibilité politique et écologique réelle à même de se diffuser dans un gouvernement cohérent, un ministre de l’Environnement est condamné à prendre des coups et à mécontenter les écologistes comme les capitalistes. » Son titre de ministre d’Etat n’aura guère changé la donne, car la question environnementale, malgré l’urgence climatique, se situe sur le long terme, et elle est subversive, alors que l’action politique doit fournir des résultats rapides et gérer des compromis. Là est le dilemme. En 1971, on disait que le critère de réussite du ministère de l’Environnement serait sa vocation à disparaître quand tout aurait été résolu. Ce n’est malheureusement pas le cas. Loin s’en faut ! Alors, à défaut d’un ministère de l’impossible, ne faudrait-il pas mieux privilégier dans chacun des ministères, dans chacune des administrations, les enjeux du long terme, au premier rang desquels la question environnementale. Là serait la véritable révolution !