Cela fait penser au Far West, et à ces affiches d’appels à la délation contre récompense, placardées dans les bureaux des shérifs et popularisées par les westerns. Tandis que le 9 juin, en Ariège, un ours est retrouvé abattu, une ONG, Sea Shepherd, décidait d’offrir une récompense de 10 000 €, portée depuis à 30 000 €, à quiconque donnerait des informations pour faire avancer les investigations. Fondée par un écologiste canadien, Paul Watson, qui avait quitté Greenpeace, dont il avait été l’un des fondateurs, parce qu’il jugeait son action trop passive, l’association Sea Shepherd, spécialisée dans la sauvegarde des océans, est coutumière d’opérations coups de poing, très médiatiques. Ses méthodes sont contestées même au sein d’autres organisations écologistes.
Cet épisode n’apaisera pas les relations déjà difficiles et complexes entre défenseurs du pastoralisme (éleveurs et bergers) et promoteurs du plantigrade. Relations qui n’ont cessé de se dégrader depuis les années 1990, lorsque l’Etat a engagé un programme de sauvetage de l’ours brun des Pyrénées, avec l’introduction de plantigrades venus de Slovénie. Aujourd’hui les Pyrénées accueillent une cinquantaine d’ours mais, en 2019, les éleveurs ont été indemnisés pour la perte d’un millier de brebis. Si bien qu’une rallonge de 500 000 € a dû être allouée à la cohabitation entre pastoralisme et ours.
Depuis trois décennies, deux légitimités « écologiques » s’opposent. D’un côté, celle d’une nature, vue souvent par des urbains, et qui laisse une place grandissante à la faune sauvage. De l’autre, celle du pastoralisme qui a inventé, depuis des millénaires, une relation originale entre les hommes, les animaux et la nature, rendant la montagne si attrayante. En effet, quoi de plus écologique que ces pâturages extensifs, ces estives et ces parcours, qui valorisent les ressources fourragères de ces vastes espaces naturels ! L’écologie n’est pas toujours là où elle est le plus vigoureusement revendiquée.