Un taux d’abstention record, un Front national qui réalise des scores de 30 à 40 % là où il est resté en lice au second tour…. jamais de modestes élections cantonales n’auront provoqué un tel séisme politique au point de reléguer au second rang de l’actualité le tragique cataclysme nucléaire au Japon ou la guerre en Libye. Désormais le monde rural n’échappe pas à cette « nationalisation » du scrutin. Il y a encore quelques années, les ruraux cultivaient leur singularité dans ce type d’élections, entretenant une relation particulière avec le conseiller général, homme connu de tous, qui savait frapper aux bonnes portes pour dégotter une subvention.
Depuis le comportement électoral des ruraux s’est banalisé : autant d’abstentionnistes qu’en ville, de plus en plus de candidats parachutés ou totalement inconnus, une campagne de terrain morne où l’on néglige les compétences du Conseil général : l’action sociale, la voirie, les collèges…, pourtant si essentielles pour l’avenir du monde rural. A quoi s’ajoute le vertige du citoyen moyen devant la complexité de ce mille-feuilles institutionnel où se superposent commune, canton, intercommunalité, pays, département, région, Europe…Le canton est mort, commentent les politologues qui avaient déjà enterré le département. Pourtant les élections régionales et européennes ne font guère mieux en matière de participation électorale. N’est-ce pas plutôt une forme de démocratie de proximité qui est en cause, à laquelle échappent pour le moment les élections municipales ?
Désormais les enjeux nationaux déterminent de plus en plus les choix locaux dans une France non plus traversée par le clivage Gauche/Droite, mais par ceux qui sont favorables à la mondialisation et ceux qui la récusent. Car ces élections témoignent avant tout d’un désarroi profond, tel que le diagnostiquait le médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, il y a deux semaines, lors de la remise de son ultime rapport. « Les enjeux déterminants pour notre avenir, écrivait-il, ne trouvent pas de réponse politique à la hauteur ». Il faut croire que nos hommes politiques ne lisent pas les rapports du médiateur de la République.