Le nouveau monde (politique) est parfois difficile à déchiffrer. Ainsi la demande du Président de la République à l’actuel ministre de l’Agriculture, Didier Guillaume, de renoncer à se présenter comme tête de liste à la mairie de Biarritz, est apparue comme une sanction. Dans l’ancien monde, devenir ministre était considéré comme l’apothéose d’une carrière politique. Désormais, cela ne semble plus le cas. Il est vrai qu’être élu maire ou sénateur assure une plus grande longévité politique qu’un maroquin ministériel qui peut vite se transformer en siège éjectable. Il faut donc assurer les arrières.
Ce que font de plus en plus de maires de droite et de gauche, souvent de grandes villes, ne pouvant plus cumuler les mandats politiques, mais aussi d’anciens ministres ou chefs de gouvernement, qui deviennent avocat d’affaires ou lobbyiste, monnayant chèrement leur carnet d’adresses, multipliant les jetons de présence dans des conseils d’administration ou investissant dans des fonds de pension, ce qui leur permet allègrement de décupler (voire plus !) leurs indemnités de fonctions. Vincent Jauvert, grand reporter à L’Obs, dans son livre Les Voraces, les élites et l’argent sous Macron (1), cite de nombreux exemples, qui laissent à penser qu’il ne s’agit pas d’un phénomène marginal. Cela concerne aussi l’administration, avec des hauts fonctionnaires qui pantouflent et rétropantouflent passant du public au privé, de l’entreprise à la politique et inversement, au gré des opportunités et du copinage.
Ces attitudes alimentent le sentiment de frustration et d’injustice et nourrissent la défiance entre les Français et leurs élites. Notons toutefois que bon nombre d’hommes politiques résistent à cet attrait insatiable pour l’argent et réclament plus de transparence et d’éthique, mais se heurtent trop souvent à un establishment trop engoncé dans ses privilèges. Dans ce contexte, ne soyons pas étonné qu’il soit de plus en plus difficile de faire passer le message des réformes auprès de l’opinion publique…
(1) Les Voraces – Vincent Jaubert – Robert Laffont – 201 pages – 19 €.