La beauté est là et nous ne savons pas la voir. Tel est le constat que fait la philosophe Laurence Devillairs qui, dans un livre au style limpide et agréable, La Splendeur du monde (1), nous invite à travers son histoire et ses anecdotes à aller à la rencontre de la beauté. Non pas la beauté sublime qui nous envahit ou le beau tapageux qui nous envoûte, mais cette splendeur simple qui nous surprend et nous interpelle, et qu’elle compare à un embrasement amoureux. Comme ces corneilles sur le toit d’une gare parisienne qui l’ont sauvé d’une dépression.
« On pense quand on voit et voir fait penser », écrit Laurence Devillairs qui considère que la beauté est notre géographie et aimerai que sur son passeport soit écrit : aime Baudelaire, la mer, les SexPistols et Hegel, plutôt que son état-civil. Car, voir c’est s’ouvrir au monde, comme un remède contre le narcissisme ambiant : « Nous voyons plus loin que nous-mêmes quand nous voyons la beauté. » C’est cultiver la curiosité, accepter le silence qui n’est pas que vide ; c’est regarder le vivant comme une pièce unique, et ne pas opposer nature et culture. « Face aux champs de tournesols, écrit l’auteure, on devrait éprouver le même respect qu’au regard des toiles de Van Gogh ». C’est aussi faire le bien : « A chaque fois que l’on accomplit le bien, on ajoute de la beauté au monde ».
Mais comme tout cela semble contraire à notre quotidien, qui privilégie l’esbroufe, le tapageur, l’agitation, la beauté préfabriquée des vacances à la splendeur de la liberté… Que cet art du voir et du ressentir est compliqué, en ces temps moroses (heureusement, il y a les JO !). D’où ce livre qui nous guide dans notre apprentissage à aller à la rencontre de la beauté. D’ailleurs à la fin du livre, l’auteure, qui réclame une éducation à la beauté, un ministère de la transition esthétique et rêve d’une république du beau, nous propose des exercices et notamment de tenir un carnet de bord des moments où l’on a été saisi par la beauté.
1/ Stock, 198 pages, 19,50 €